Bou Saâdia, L’homme qui traversa le désert.
Série du projet La Dernière danse
Tunis avait son souk aux esclaves, dont l’activité journalière était extrêmement importante. Les descendants d’esclaves d’origine africaine, avait conservé de leurs lointaines contrées des danses et des musiques pratiquées par un personnage aussi surprenant que mystérieux : le Bou Saâdia.
Personnage mythique du folklore populaire tunisien, danseur et musicien de rues, mi-saltimbanque mi-sorcier, il évoque par sa gestuelle et sa musique les danses populaires d’Afrique noire.
Littéralement, Bou Saâdia, signifie, le « père de Saâdia ».
L’histoire, répandu dans le culte Stambali, raconte que le Bou Saâdia, représente un père dont la fille, Saâdia, aurait été enlevée et vendue comme esclave par les esclavagistes arabes. Parti de son village situé dans l’ancien empire du grand Soudan, il voyagea jusqu’au Maghreb, errant de rues en rues, de places en places, de villages en villages dans l’espoir de découvrir sa fille parmi les jeunes spectateurs. Amusant les adultes et terrorisant les enfants, il participait à l’animation des rues et des marchés en effectuant sa représentation seul au milieu de la foule rassemblée sur une place publique ou au milieu d’un souk.
Aujourd’hui presque disparu, même si on le voit encore rarement en Algérie, en Tunisie et au Maroc (Bouderbala)
Il déambule dans les lieux qu’il représente (la forêt, le désert, la mer…) dans une quête identitaire, sur les traces des communautés noires du Maghreb.
Le Stambali est un culte de possession, qui prend sa source en Afrique Sub-saharienne. Il s’est répandu en Tunisie et en Afrique du Nord avec les populations amenées en esclavage pendant la traite orientale. A l’instar des Gnawa du Maroc et du Diwan algérien, ce rituel est pratiqué par les communautés noires de Tunisie. Mélange entre le culte bori de la culture Haoussa et le culte populaire des saints musulmans, le stambali est devenu une tradition dans la Tunisie contemporaine.
Les chansons et rites de la confrérie du Stambali, racontent l’histoire de l’esclavage et de la déportation de populations d’Afrique subsaharienne par les marchands arabes vers le Maghreb.
Le Bou Saâdia y apparait, tel un vieux souvenir de ce traumatisme collectif qui se perd dans les noubas du stambali. Personnage mythique du folklore tunisien, il symbolise le déracinement des personnes ayant vécu l’esclavage, arraché de leur terre à la recherche de leur identité.
Ils témoignent à la fois de l’histoire de ces peuples et de leurs pratiques mystico-religieuses, indissociables de la traite orientale, et, à la fois, de la richesse de ce patrimoine immatériel.
Même si les pratiques ont évolué de manière nuancée selon les pays, ces musiciens puisent leur origine commune dans une affiliation symbolique à Sidi Bilal, premier muezzin de l’Islam et premier esclave noir affranchi par le prophète Mahomet. Leur intégration au monde arabe a pu se faire en se mêlant aux pratiques et croyances de l’Islam populaire.
Ce culte, entremêlant musique et danses, invoque les esprits par un phénomène de possession ritualisé où les adeptes offrent leur corps aux divinités dans une transe expiatoire. La musique joue, ici, le rôle d’une mise en ordre du monde.
“À travers le personnage emblématique du culte Stambali qu’est Bou Saadiya, danseur folklorique et musicien de rue, mi-saltimbanque et mi-sorcier, le photographe revisite en arpenteur les périples de ce père parti à la recherche de sa fille, enlevée et vendue comme esclave.
La série retrace ces pas, depuis son village dans l’ancien Empire du grand Soudan jusqu’au Maghreb, dans une mise en scène naturaliste qui fait traverser au personnage différents espaces hostiles ou territoires inconnus. Les plans d’ensemble, propices à l’errance ainsi qu’à l’attente, le sont davantage pour un corps qui se détache sur fond de mer ou de désert, se replie dans la forêt ou dans une grotte montagneuse pour échapper au regard.”

Arifa
Petites histoires du monde invisible
“I AM MA GAGIA, I AM BABA KOURI, I AM SIDI ABDELKADER. ARIFA IS MY BURDEN, ARIFA IS MY CHAIN THAT LINKS ME TO THE GREAT WORLD.
ARIFA IS MY FREEDOM TO EXIST ON THIS BRIDGE THAT CONNECTS THE WORLD OF HUMANS TO THAT OF SPIRITS.”











